A l’occasion de la sortie du Cahier N°10 et des 10 ans de la société, un travail considérable de relecture d’un récit inédit de Jean Malaquais, La Légende d’Abd-el-Kader, a effectué par Guy Zaïtoun, fidèle membre de la société. Guy revient avec cet article sur son expérience de transcription.
Lorsque Geneviève nous a proposé le challenge de mettre au clair un texte inédit de Jean Malaquais, La légende d’Abd-El-Kader, j’ai tout de suite accepté avec appétit de me lancer dans le décryptage de cette écriture pleine de chausse-trappes.
Ma motivation essentielle était le désir de contribuer, à une échelle très modeste, à l’enrichissement de l’œuvre malaquaisienne. D’autant qu’il semblait s’agir d’un texte de jeunesse dont on pouvait attendre quelque révélation
Circonstances
Ce manuscrit nous a été envoyé le 16 avril 2020. A cette date je me remettais lentement d’un accident qui m’avait pas mal immobilisé. Et voici que nous arrive le confinement, pourvoyeur de temps libre à ne plus savoir qu’en faire ! (De toute contrainte, on peut tirer quelque avantage !). Si l’on ajoute à cette situation que l’un de mes traits de caractère est la patience, on a alors le bon contexte. Cela m’a occupé l’esprit au moins une semaine.
Aspect matériel
Ma première béquille a été purement technique : le fameux zoom que propose tout ordinateur qui se respecte. Alors, plus les pattes de mouches sont agrandies, mieux on discerne leurs liens avec le corps du mot, qui devient ainsi une sorte d’insecte à reconnaître (une espèce de travail d’entomologiste !). Ainsi chaque mot ressuscité représente une minuscule victoire. Mais ils sont nombreux à résister.
Technique personnelle
Il s’agit de rechercher des tics d’écriture, de repérer les liaisons particulières dans un groupe de lettres qui semblent alors constituer d’autres lettres pour mieux nous tromper. Mais on finit toujours, en examinant la répétition de ces caractères, par casser le code (il ne s’agit pas non plus de percer les secrets du fameux Enigma !). Ensuite, dernier outil, il faut lire à haute voix les phrases où certains mots résistent encore au déchiffrage pour les retrouver par le contexte. Enfin lire et relire le texte dans son ensemble pour que tout devienne transparent même les néologismes ou les petites erreurs.
Appréciez le travail particulièrement ardu de transcription réalisé
Appel aux souvenirs (voir Cahier Jean Malaquais n°10)
Au fur et à mesure du déchiffrage du manuscrit, je me suis senti totalement concerné par l’environnement subtilement décrit par l’auteur. Cela a grandement facilité le processus. Je me suis reconnu dans les gens, les lieux, les bruits, les odeurs de ma jeunesse en Tunisie. Je n’ai eu aucune difficulté avec les quelques mots arabes du texte : la loubia, ce délicieux plat de haricots, la gandoura que portaient les musulmans en particulier les jours de fêtes, le marabout (en arabe morâbit), pieux musulman très respecté… Mes souvenirs d’enfance ont constitué une aide précieuse dans la mise au clair de ce manuscrit.
Ce travail a surtout été un plaisir car il m’a permis de découvrir l’éclosion d’un talent : la naissance d’une écriture marquée par l’humanisme et l’empathie. Cette Légende d’Abd-El-Kader, malgré sa modestie, annonce pour moi l’écrivain Jean Malaquais des Javanais.
Guy Zaïtoun
Note (hors sujet)
Relisant récemment Les cavaliers, le roman afghan de Joseph Kessel, j’ai rencontré le personnage de Guardi Guedj, le conteur sans âge, l’aïeul de tout le monde qui m’a fait inexorablement penser à Abd-El-Kader !
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